PRÉDICATION L’événement que nous lisons aujourd’hui dans la Bible et que nous fêtons, se nomme la Pentecôte. Nous ne savons pas toujours très bien ce que cela signifie. La fête de la Pentecôte vient du judaïsme. Elle est liée à la célébration de Pâques, autrement dit à la sortie d'Égypte. Mais quel est son sens ? Est-il resté le même jusqu'à la Pentecôte chrétienne ? En Israël, le passage d’un mode de vie nomade à un mode de vie sédentaire a provoqué de profonds changements dans la société et dans le culte. Par définition, le culte nomade ne peut pas être associé à des lieux fixes, comme des sanctuaires ; tout doit pouvoir se transporter. Cependant, même dans la religion d'un peuple nomade, il existe des lieux fixes qui ont un rôle symbolique fort. Il en est ainsi de la montagne du Sinaï et de plusieurs autres sites dans le désert.Dans le judaïsme de l’époque de Jésus, il était coutume de respecter trois grandes fêtes annuelles qui suivaient le calendrier agricole : - la fête des pains sans levain (matsoth) au début de la moisson, qui sera combinée plus tard à la Pâque pour ne plus faire qu’une seule fête se référant à la sortie d’Égypte. - la fête des Moissons, appelée aussi fête des Semaines, qui est célébrée à la fin des moissons. - enfin, la fête des vendanges qui clôture le cycle annuel des récoltes. Ces grandes fêtes annuelles sont des fêtes de pèlerinage. Leur célébration rappelle les grandes étapes de l'histoire du peuple et les réactualise. Dans notre récit il est question de la fête de la Pentecôte. Celle-ci prenait place dans le calendrier liturgique, cinquante jours après Pâques : La fête des Semaines, ou fête du "Cinquantième" jour, était appelée ainsi parce qu’elle était célébrée par les Israélites sept semaines après l’offrande des prémices de la moisson (en grec le mot Pentecôte signifie cinquante). Le livre du Deutéronome, au chapitre 16 et le livre du Lévitique au chapitre 26 décrivent les modalités du pèlerinage de cette fête. La fête de la Pentecôte rappelle le don de la Loi à la montagne du Sinaï ; elle a peutêtre été célébrée au Temple de Jérusalem, pour aboutir, après la destruction du Temple, à la maison de chaque croyant. Dieu ne peut plus être attaché à un lieu, fut-il sacré. Cette évolution correspond à une conviction : le croyant, homme ou femme en mouvement, disponible, ne doit pas avoir d’autres attachements que Dieu. Le récit de Luc évoque la venue de l’Esprit saint sur les participants, cela ressemble à des langues de feu qui se posent sur chacun. Luc souligne qu’il s’est passé lors de cette première fête de la Pentecôte après la mort de Jésus, un événement sans pareil depuis le don de la loi au Sinaï. Dieu avait communiqué sa volonté à son peuple en lui, donnant les dix commandements. Mais ici l’Esprit de Dieu vient se poser sur chaque participant. Nous avions entendu sous la plume d’un prophète les paroles suivantes : j’inscrirai ma volonté dans le cœur des hommes et non plus sur des tables de pierre. C’est chose faite et Dieu continue à le faire. Nous savions déjà que lorsque Dieu a créé l’homme, il l’a créé à son image. Il souffla dans ses narines pour qu’il devienne un être vivant. Mais le premier testament nous livre de nombreux récits qui semblent dire que cet esprit, présence de Dieu, a été obscurci dans l’intelligence et le cœur des hommes. Ici Luc, tout comme Jean d’ailleurs, se souvient des paroles de Jésus qui avait promis de leur envoyer l’Esprit Saint. À vrai dire, l’Esprit de Dieu n’avait jamais cessé d’être présent et de guider ceux et celles qui tendent leurs oreilles et leurs mains vers Dieu. Toutefois par l’œuvre révélée de Jésus, nous percevons que Dieu désire sauver tout homme, toute femme qui se tourne vers lui. Le pardon est un don mais aussi une promesse que Dieu fait, d’être toujours présents, non de façon diffuse, mais de manière réelle, existentielle avec ceux qui prennent le temps de se placer dans le silence de leur intimité en sa présence. Ce que Jésus révèle, c’est que Dieu n’a jamais voulu se couper des humains. Ce que nous nommons le Saint-Esprit est en réalité la présence spirituelle de Dieu auprès de chacun. Il ne s’agit pas seulement de parler du Dieu créateur de l’univers, Dieu puissant qui serait au fond très éloigné de nous. Dont on pourrait percevoir l’œuvre, mais qui serait inaccessible… Bien sûr, Dieu se montre plus précisément proche de nous en Jésus-Christ. Mais ici il promet d’être présent avec chacun, dans le creux de nos vies. Le SaintEsprit, c’est la présence spirituelle, réelle de Dieu dans notre existence. Nous aurions tort de réduire la présence réelle à une fresque symbolique qui serait manifestée par une lueur dans un bâtiment d’église ; ce n’est là qu’un symbole. Le choix de Dieu c’est d’habiter dans le cœur et l’intelligence des humains ; de devenir leur guide, leur conseiller leur défenseur. Pentecôte est un miracle des langues, c’est la fête de la compréhension mutuelle. Le message de l’Évangile sera transmis au monde entier dans la diversité des langues. Le récit de Luc ne parle pas de langues mystérieuses angéliques ou extraterrestres. Il s’agit de la communication de l’Évangile au monde entier, à des hommes et des femmes de tous les peuples. Dieu n’exige pas que l’on parle là l’hébreu ou le grec pour bien le comprendre. Dieu parle au cœur des hommes au-delà des langages. Lui, il parle toutes les langues. Ou plutôt il parle au cœur et aux intelligences par son œuvre au-delà des mots. Chacun ici comprend « les merveilles de Dieu ». Ils parlent latin aux Romains, grec aux Crétois, arabe aux Arabes… Éloge de la diversité, du multiculturalisme, dirait-on aujourd’hui dans notre français contemporain. L’Esprit de Dieu, son souffle va animer les disciples, va les transformer et les rendre capables de communiquer l’Évangile. L’œuvre de Dieu ici ne consiste pas à donner à ses disciples le pouvoir de parler une langue mystérieuse, mais à signifier qu’il marche avec eux et qu’il va susciter en eux des dons, des capacités afin qu’ils soient en mesure de vivre et communiquer la Bonne Nouvelle au plus grand nombre. Ces hommes et femmes craintifs qui avaient perdu l’espoir, sont ici animés par une force qui va les conduire et les équiper pour leur mission. Ils seront prédicateurs, créateurs de communautés locales. Ils accompagneront les malades et les guériront, cela par l’œuvre unique de Dieu. La tradition chrétienne qui s’inspire des récits de la Pentecôte insiste sur le fait que l’Esprit de Dieu est venu se poser sur les apôtres et animer leur être. Désormais Dieu les accompagnera. La présence spirituelle de Dieu est donc promise à tous ceux qui se tournent vers Lui. Il nous assure de l’immense bonté de Dieu ! Il nous fait prendre conscience de la sainteté de Dieu de sa perfection infinie, mais un pas est franchi nous n’avons pas à craindre la sainteté de Dieu au contraire le Dieu Saint nous accueille en sa présence et vient transformer nos vies. Nous prenons plus que jamais conscience que nous sommes des êtres imparfaits, capables du meilleur comme du pire, des êtres pécheurs oui, mais nous ne sommes pas cloués dans nos faiblesses. Dieu se réconcilie avec nous et nous conduit à nous réconcilier avec nous-mêmes et avec nos proches. Les disciples du Christ sont baptisés dans l’Esprit, ce qui signifie qu’ils sont libérés du mal et capables de se laisser guider par Dieu. Dans le secret de nos vies et de nos consciences il peut nous éclairer sur la route à suivre. Et il peut nous aider à lutter contre les puissances hostiles qui agressent nos vies. Alors, Dieu créé en nous une identité nouvelle et nous aide à comprendre que nous ne nous sommes pas réductibles à ce que l’on dit ou pense de nous et pas réductibles à nos erreurs passées et à nos errances. Mais l’esprit de la Pentecôte nous enseigne aussi que Dieu compte sur nous pour être ses témoins dans un monde qui souvent s’égare. Pour cela, il suscite en chacun des dons particuliers. Ces dons peuvent être des aptitudes naturelles innées, peut-on dire mais aussi des qualités ou charismes nouveaux que Dieu révèle et fait naître dans nos vies. L’apôtre Paul évoquera ces dons en différents textes des épîtres. La marque majeure de ses aptitudes, de ces dons, réside dans le fait qu’ils ne nous sont pas donnés pour nous-mêmes, mais pour le service de notre prochain et le service des autres. Dans la première épître aux Corinthiens, Paul en évoque quelques-uns : Dieu a établi dans l’Église premièrement des apôtres, secondement des prophètes, troisièmement des docteurs, ensuite ceux qui ont le don des miracles, puis ceux qui ont les dons de guérir, de secourir, de gouverner, de parler diverses langues… Dans l’épître aux Romains, il aborde ce sujet en mentionnant d’autres dons : Ne vous conformez pas au siècle présent, mais soyez transformés par le renouvellement de l’intelligence, afin que vous discerniez quelle est la volonté de Dieu, ce qui est bon, agréable et parfait. Par la grâce qui m’a été donnée, je dis à chacun de vous de n’avoir pas de lui-même une trop haute opinion, mais de revêtir des sentiments modestes, selon la mesure de foi que Dieu a départie à chacun. Car, comme nous avons plusieurs membres dans un seul corps, et que tous les membres n’ont pas la même fonction ainsi, nous qui sommes plusieurs, nous formons un seul corps en Christ, et nous sommes tous membres les uns des autres. Puisque nous avons des dons différents, selon la grâce qui nous a été accordée, que celui qui a le don de prophétie l’exerce selon l’analogie de la foi, que celui qui est appelé au ministère s’attache à son ministère; que celui qui enseigne s’attache à son enseignement, et celui qui exhorte à l’exhortation. Que celui qui donne le fasse avec libéralité; que celui qui préside le fasse avec zèle; que celui qui pratique la miséricorde le fasse avec joie. Que la charité soit sans hypocrisie. Ayez le mal en horreur; attachez-vous fortement au bien. Par amour fraternel, soyez pleins d’affection les uns pour les autres; par honneur, usez de prévenances réciproques. Tous les dons que Dieu nous accorde n’ont pas un caractère surnaturel ou exceptionnel, mais Dieu nous invite à mettre au service de notre prochain ce que nous avons reçu et non à enterrer nos talents. Chaque année, lorsque nous fêtons la Pentecôte, il nous appartient de croire que Dieu fait à nouveau venir son Esprit sur chacun de nous ! Amen. Chant 35.19 § 1, 2et 3 : Pour que le jour qui se lève soit plus