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Chère Madame, cher Monsieur,

« Des allées désertes, tout comme les jeux pour enfants. Des bancs souvent occupés par des hommes seuls, marginaux, des buissons envahis de bouteilles et canettes…Du sud du quartier de la Goutte-d'Or, en passant par la place de la Chapelle, la halle Pajol et jusqu'à la rue d'Aubervilliers, aux confins des XVIIIe et Xe arrondissements, les jardins et squares se sont vidés des promeneurs et des familles, chassés par l'insécurité, la toxicomanie, les dégradations, parfois. »

Voilà la situation que décrivait le journal Le Parisien, il y a quelques jours.

Mais ce ne sont pas seulement quelques arrondissements dans le nord-est de la capitale qui sont touchés par l’occupation sauvage et la dégradation des espaces publics.

Moi qui travaille à Paris depuis longtemps, j’ai pu constater, années après années, que la situation se dégradait progressivement partout, y compris dans les « beaux quartiers ».

J’ai vu se multiplier les « mendiants » et les « sans-abris », allongés sur les trottoirs, postés à l’entrée des magasins, à côté des distributeurs de billets, souvent alcoolisés, parfois agressifs. Déjà deux jeunes femmes qui travaillaient dans nos bureaux ont eu à subir des agressions de la part d’individus de ce genre. Alors même que nos locaux sont dans un des arrondissements censés être parmi les plus préservés de Paris !

J’ai vu la saleté augmenter, ainsi que les comportements incivils. Il n’y a pas longtemps, dans un quartier très « chic », une amie a même vu un homme déféquer tranquillement dans la cabine d’un Photomaton, puis repartir comme si de rien n’était.

Je vous promets que je n’exagère pas !

La réalité est que la ville de Paris paye aujourd’hui des années de complaisance vis-à-vis de l’occupation illégale des espaces publics, vis-à-vis des campements sauvages de « sans-abris » ou de « migrants », vis-à-vis de la drogue aussi.

Et elle est loin d’être la seule ville française dans cette situation. Beaucoup de nos métropoles connaissent les mêmes problèmes.

Malheureusement, bien souvent, les autorités hésitent à agir avec fermeté car elles ont peur d’être accusées de faire la chasse aux « pauvres ».

Évidemment, personne n’a envie d’avoir l’air de manquer de compassion vis-à-vis de gens qui vivent dans des conditions très précaires. Et nous devons aider les plus fragiles d’entre nous.

Mais nous devons faire ce qui est réellement le mieux pour ces personnes en difficulté, et pas ce qui nous fait plaisir ou qui nous donne bonne conscience.

Et nous devons aussi faire respecter le droit de tout un chacun à la sécurité et à la tranquillité. Les autres habitants n’ont pas à subir les incivilités, la saleté et l’insécurité pour permettre aux municipalités d’afficher leur « compassion ».

À l’Institut pour la Justice nous avons depuis longtemps réfléchi à ce problème. Nous avons étudié ce qui se fait à l’étranger, et quelles sont les solutions qui marchent.

Aux États-Unis, par exemple, certaines grandes villes, comme Seattle, ont vu le nombre de leur « sans-abris » exploser ces dernières années.

En cause, une politique municipale très « tolérante » vis-à-vis des campements sauvages et de la drogue, ainsi que des aides sociales très généreuses et la construction de « salles de shoot ».

Résultat, Seattle est devenu un véritable aimant pour les marginaux et les toxicomanes. Leur nombre s’est multiplié et l’insécurité s’est envolée.

Les atteintes aux biens ont atteint un taux deux fois et demi supérieur à celui de Los Angeles et quatre fois supérieur à celui de New-York, des villes pourtant beaucoup plus peuplées. Les équipes de nettoyage ramassent des dizaines de millier d’aiguilles usagées dans les rues et les parcs de la ville chaque année. Dans certains quartiers les commerces de proximité périclitent et les riverains n’en peuvent plus.

Aujourd’hui, une ville comme Seattle dépense plus d’un milliard de dollars par an pour ses « sans-abris », et pourtant le problème ne fait que s’aggraver.

Mais d’autres villes américaines, confrontées au même problème, ont su réagir avec plus d’intelligence et d’efficacité.

Elles ont compris que, dans cette situation, la fermeté n’est pas incompatible avec l’humanité, bien au contraire.

Comme l’écrivait un spécialiste américain de la question, dans le dernier numéro de notre revue : « La réalité, évidente pour n’importe qui ayant passé un peu de temps dans les villages de tentes ou dans les hébergements d’urgence, est que 80% des sans-abris souffrent d’addiction à l’alcool et aux stupéfiants et que 30% d’entre eux sont atteints d’affections psychiatriques graves, comme les troubles bipolaires et la schizophrénie. »

Il n’y a rien de compatissant dans le fait de laisser des toxicomanes, des malades mentaux et des pauvres mourir dans les rues. Et une telle politique de complaisance transforme la vie des riverains en enfer.

La première priorité doit être de nettoyer les espaces publics, de diriger les gens vers des foyers, où ils pourront effectivement être aidés, et de maintenir l’ordre public.

À Houston, les responsables locaux ont réduit le nombre de sans-abris présents dans les rues de 60%.

À San Diego, la police et les équipes municipales ont fait disparaître tous les campements sauvages de la ville, tandis que plus de 700 personnes étaient dirigées vers trois grands refuges nouvellement construits.

À Burien, une petite ville de 50 000 habitants proche de Seattle, le centre-ville revit après avoir été en proie pendant des années à des centaines de sans-abris et de toxicomanes qui vivaient dans ses rues.

Et je pourrais citer bien d’autres exemples, avec à chaque fois des résultats très positifs, pour tout le monde.

Les principes d’action sont simples.

D’une part les biens publics appartiennent au public - à nous tous - et ne peuvent pas être privatisés au profit d'un ou de plusieurs vagabonds, aussi pauvres ou malades soient-ils.

Par ailleurs beaucoup de sans-abris souffrent de graves problèmes, physiques et psychiques, et ne peuvent pas s’en sortir sans une aide prolongée.

Ceux qui ont besoin d’aide doivent donc recevoir cette aide au long cours dans des structures spécialisées.

Les municipalités doivent construire des refuges et les services sociaux doivent aller à la rencontre des sans-abris pour leur proposer d’y être aidé. Mais pour ceux qui occupent les espaces publics, le choix ne doit pas être entre aller dans un foyer ou rester dans la rue. Il doit être entre rejoindre une structure d’accueil et être délogé ou arrêté.

La police doit être sans faiblesse vis-à-vis des occupations sauvages, vis-à-vis des incivilités, vis-à-vis de la consommation de drogue ou d’alcool dans la rue, quel que soit le profil des consommateurs. Car c’est la meilleure manière de faire respecter les droits et les intérêts de tous.

Nous n’avons pas à choisir entre la compassion et la sécurité. La vraie compassion passe par le respect de l’ordre public.

Il serait temps qu’en France aussi nos dirigeants s’en rendent compte. Vous pouvez compter sur nous pour le leur faire savoir et pour les aiguillonner.

Avec tout mon dévouement,

Laurence Havel


 
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